Qu'est-ce qu'une mère suffisamment bonne aujourd'hui ? L'apport de Winnicott
Qu'est-ce qu'une mère suffisamment bonne aujourd'hui ?
Nous voulons tous être de bons parents. Et si au lieu de multiplier les exigences, nous étions « suffisamment bons » comme le conseillait le siècle dernier, Donald W. Winnicott, un précurseur de la psychologie de l'enfant ?
Est-ce que je fais bien ? Qu'est-ce que je fais mal ? Dois-je en faire plus ? Comment faire mieux ?
Les parents d'aujourd'hui se posent beaucoup de questions. Ils cherchent dans les livres, sur Internet, en conférence, bien des réponses. Mais plus on se pose des questions, plus on se met la pression à vouloir être un parent parfait…ce qui n'existe pas.
Revenons plutôt à l'essentiel. Au début des années 1950, Donald W. Winnicott formule le concept de « mère suffisamment bonne », qui sonne comme une libération. 70 ans et bien des changements sociaux plus tard, les psys s'accordent toujours à reconnaître l'intelligence de cette notion, qui est même devenue un incontournable de la psychologie de l'enfant.
En effet il suffit d'être un parent suffisamment bon. Ni plus ni moins. Ni trop, ni pas assez.
De quoi un enfant a-t-il besoin ?
Les parents cherchent maintenant à tout comprendre, du développement neurologique, mais aussi émotionnel et cognitif de l'enfant. La tentation est grande de vouloir se former au « métier de parents ».
A cela Winnicott répondait : « si elles voient les choses par l'autre bout et pense qu'elles doivent travailler dur dans des livres pour savoir comment être une mère parfaite dès le début, elles seront sur le mauvais chemin. A long terme, ce dont nous avons besoin, c'est de mères et de pères qui ont découvert comment croire en eux-mêmes ».
L'essentiel est de répondre aux besoins fondamentaux de l'enfant. Ses besoins sont les mêmes depuis l'aube de l'humanité. Le rôle des parents est tout simplement de prendre soin de l'enfant, d'un point de vue physiologique (nutrition, sommeil), psychique (sécurité, identité) et affectif (amour, consolation), tout au long de sa vie.
Et si je faisais des erreurs ?
Est-ce que je transmets ma colère ou mon angoisse à mon bébé ? Est-ce que je dois me forcer à jouer avec mon enfant ?
En fait, nous n'avons qu’une peur : celle de faillir à notre devoir, et ainsi de prendre le risque de blesser, voire de traumatiser.
Ce à quoi Winnicott répond : « Ensuite, le bébé commence à avoir besoin d'une mère défaillante. Cette défaillance, elle aussi, est un processus graduel qui ne s'apprend pas dans les livres. Il serait regrettable qu'un petit humain continue à faire l'expérience de l'omniprésence de sa mère, alors que son appareil psychique est devenu capable d'affronter les frustrations et les défaillances relatives à l'environnement ».
Il est normal de rater certaines choses et cela peut-être constructif pour l’enfant. Winnicott s'adresse à des parents ordinaires. On ne peut satisfaire totalement son enfant. C'est d'ailleurs cela qui renforce les capacités de l'enfant à s'adapter, à créer, à grandir. Et c'est tant mieux.
Ai-je le bon rôle de maman ? de papa ?
La réponse de Winnicott : « la mère (qui n'est pas forcément la propre mère de l'enfant) suffisamment bonne est celle qui s'adapte aux besoins de l'enfant. Cette adaptation diminue progressivement à mesure que s’accroît la capacité de l'enfant à faire face à une défaillance d'adaptation et à tolérer la frustration ».
Globalement, il y a celle qui pallie la dépendance de l'enfant, dans « une préoccupation maternelle primaire » et celui qui opère en douceur une séparation pour favoriser l'autonomie.
Faut-il l'écouter ou m'écouter ?
Depuis les années 70, nous écoutons plus la parole de l'enfant, ce qui est un réel progrès. Mais le risque est de ne plus poser de limite . Or, un enfant élevé sans limite est un enfant en insécurité.
Voici la réponse de Winnicott : « un enfant normal, s’il a confiance en son père et en sa mère, et c'est tout. En grandissant, il essaie à force à fond son pouvoir de briser, de détruire, de faire peur, d'user, de gaspiller, de soutirer, d'usurper… Si la famille peut résister à tous les efforts de l'enfant pour la briser, l'enfant se met alors à jouer « .
Autrement dit, les limites posées par les parents permettent à l'enfant de grandir. Un cadre ferme, solide et bienveillant est favorable au développement de l'activité créatrice, de l'intelligence. Votre enfant ne vous aimera pas moins pour autant.
Et s’il allait mal ?
Est-ce normal qu'il ne parle pas à 18 mois ? qu'il joue tout seul dans la cour ? Et s'il était hypersensible ?
Tout écart de notre enfant résonne comme une erreur dans son éducation. La réponse de Winnicott : « on ne permet jamais à certains enfants, même pendant leur plus tendre enfance, de rester étendus et de planer. Ceux-ci perdent beaucoup, et le sentiment qu'ils désirent vivre par eux-mêmes peut leur échapper complètement ».
De tels moments permettent à l'enfant d'entrer en contact avec ses sentiments, son imaginaire. Ils enrichissent sa vie intérieure.
Où trouver le temps ?
Est-ce que je vais arriver à tout faire ? et si possible à bien faire ? le bain, la cuisine… ?
Nous avons l'impression de manquer de temps, d'énergie pour mener à bien « notre mission ». Nos impératifs ont même souvent raison de notre gaité.
La réponse de Winnicott : « le bébé ne désire pas tant un repas convenable que d'être nourri par quelqu'un qui aime le nourrir. Le bébé considère comme naturelle la douceur de ses vêtements et la bonne température de son bain. Il en va autrement du plaisir de la mère qui accompagne l'habillage et le bain. Si ces choses font plaisir, c'est pour lui comme le soleil qui se lève ».
Pour Winnicott, « un enfant seul, ça n'existe pas ». C'est dans le lien que se construit l'individu. L'enfant a besoin d'une présence joyeuse.
Comment le préparer pour un monde si complexe ?
Comment mettre toutes les chances de son côté ? Va-t-il s'en sortir ? Va-t-il réussir ? La société d'aujourd'hui fait craindre le pire aux parents.
La réponse de Winnicott : « il est des personnes qui croient qu'un enfant est comme de l'argile entre les mains d'un potier. Elles commencent à mouler le bébé et à se sentir responsables du résultat. Elles ont tort. Si c'est ce que vous éprouvez, vous serez écrasé par des responsabilités que vous n'avez pas absolument pas besoin de prendre ».
Il faut trouver une juste distance avec son enfant. Le surprotéger, c'est risquer de l'enfermer dans nos préoccupations anxieuses. S'éloigner progressivement favorise au contraire le développement de sa capacité à être seul et à faire face. Mener sa vie à soi, répondre à ses propres besoins, éprouver de la joie ou de la peine en dehors de lui, permettent de trouver la juste distance avec son enfant. Nous voir autonome le prépare aussi à sa vie de futur adulte.
Et si je n'y arrivais pas tout seul ?
Un proverbe africain dit : « il faut tout un village pour élever un enfant ». Les parents ne sont pas responsables de tout.
La réponse de Winnicott : « derrière toute mauvaise adaptation de l'enfant, il y a toujours une faillite de l'environnement qui n'a pas su ou pu adapter à ses moyens absolus. On peut aussi y ajouter la faillite de la société quand elle prend la place de la famille ».
L'idée que nous portons tout sur nos épaules est dangereux et nous empêche parfois de demander le soutien dont nous avons besoin.
Winnicott insiste sur le rôle crucial de la communauté dans le développement de l'enfant. Reconnaissons nos limites et nos difficultés. La société doit offrir aux parents d'aujourd'hui un environnement qui leur permet d'exercer leur fonction dans de bonnes conditions. Et si c'était aussi à la société d'être suffisamment bonne pour ses enfants ?
Contactez Laurence ANNO Psychologue Clinicienne-Addictologue au 01 88 24 83 23 ou directement depuis Doctolib.
Le cabinet se situe à Brunoy, proche de Yerres. Montgeron. Crosnes
- mai 2024
- avril 2024
- février 2024
- novembre 2023
- août 2023